Il aura fallu deux mois après l’élection présidentielle du 4 mars 2010, pour que soit intronisé Faure Gnassingbé, en catimini, à l’issue d’une cérémonie d’investiture sur laquelle planait le poids écrasant de la fraude lors du scrutin et des violences post-électorales de toute nature qui perdurent depuis le 4 mars, du fait du pouvoir RPT.
Le peuple Togolais semble aujourd’hui désemparé, face à l’imposture qui vient de clore un processus électoral qui a complètement bafoué la démocratie. Je veux lui dire ici que rien n’est perdu, que l’histoire est pleine d’exemples de causes justes qui ont triomphé grâce à la détermination de la lutte. Le temps n’est donc plus un critère !
La volonté de Faure Gnassingbé de se maintenir à n’importe quel prix, constitue un camouflet de sa part à l’égard du peuple togolais, mais le désert qui caractérise la cérémonie pour son investiture, peut être comparé par ricochet à un énorme camouflet diplomatique à son égard. Le fait qu’aucun pays bailleur partenaire du Togo, ne soit officiellement représenté ce jour là au niveau gouvernemental, en dit long sur les doutes qu’ils peuvent nourrir quant à la régularité de l’élection.
A côté de la profondeur de l’improvisation démocratique de la classe gouvernante, qui a fait fi des dispositions de la Constitution de notre pays, la situation actuelle illustre bien le haut degré d’incertitudes qui prévaut au sein du pouvoir sortant, qui a dirigé le Togo depuis le 4 mars 2010 de la manière la plus autiste qui soit, comme si rien ne s’était produit, et comme si depuis deux mois, de très nombreux citoyens à travers ce pays n’exprimaient pas chaque samedi leur désir d’alternance politique pour rejeter une gouvernance devenue en tous points insupportable !
Cette démarche constitue un « passage en force électoral », aux fins de maintenir la dictature du statu quo politique. Elle repose sur des résultats électoraux entachés d’irrégularités constitutionnelles graves, qui ont servi à masquer l’entreprise de fraude électorale de grande envergure. Les résultats électoraux auquel le scrutin a donné lieu, impossibles à prouver, sont de nature à invalider le scrutin du 4 mars 2010. En ce sens, il existe bien réellement, une conspiration contre le peuple togolais et contre la vérité des urnes.
Contrairement à ce qu’affirment certains, il n’y a en 2010 pas davantage de politique de rupture au Togo qu’il n’y en eut en 2005, ni d’ailleurs au cours des cinq ans de gouvernance économique médiocre du pouvoir sortant. L’impunité est encore institutionnalisée au Togo.
La vraie rupture en 2010, est à chercher non pas du côté du pouvoir sortant, mais justement du côté de la majorité des Togolais, dont la contestation en 2005 avait été étouffée dans l’œuf au prix de plusieurs centaines de victimes civiles. Aujourd’hui, ils osent affirmer haut et fort, depuis plus de huit semaines leur désir de ne pas se laisser mener comme des moutons.
Cette population recherche, par tous les moyens, seule contre la domination des forces du marché et des trônes politiques, à obtenir par les voies pacifiques, ce que la contre-vérité des urnes lui a refusé : une alternance politique qui reflète leur volonté afin d’ouvrir la voie à une gouvernance au service du peuple et du développement du Togo.
Avec d’un côté, l’investiture d’un président qui ne peut se prévaloir d’aucune légitimité obtenue dans les urnes – pour des raisons déjà maintes fois exposées, confirmées par le premier rapport intermédiaire de la Mission d’Observation électorale de l’Union européenne -et de l’autre un niveau de contestation populaire grandissant qui ne faiblit pas et fait tâche d’huile dans tout le pays, nonobstant la répression et le déploiement des militaires comme le 02 mai dernier à Sokodé ; la situation du Togo en 2010, tranche singulièrement avec celle de 2005, et fait la démonstration d’une résistance citoyenne !
Le Togo arrive bien aujourd’hui à la croisée des chemins : confirmer la contrevérité des urnes ou alors dans un élan courageux, opter pour le retour à la vérité des urnes. Certains sont contraints de fonder leur décision en tenant compte du choix des populations.
Des millions de filles et de fils du Togo tout entier ont :
• manifesté pendant deux mois,
• essuyé les coups de boutoir des forces gouvernementales ;
• compté leurs blessés et des réfugiés politiques à l’étranger,
• continué à réclamer la libération de prisonniers politiques Togolais, ceci sans jugement alors qu’ils sont présumés innocents,
• subi la brutalité d’une police togolaise qui a pour mission première de « chicoter », voire d’intimider par des délits graves, ceux qui clament le retour de la vérité des urnes.
Ce lundi 3 mai 2010, a sonné comme l’heure de vérité qui va permettre de clarifier le jeu politique de notre pays, en désignant ceux qui travaillent réellement pour les intérêts du peuple togolais. Chacun va se trouver désormais en face de ses responsabilités. A partir de ce lundi, chacun devra abattre clairement son jeu et choisir son camp : pour la vérité des urnes ou pour la contrevérité des urnes.
A plusieurs reprises ces dernières semaines, j’ai eu l’occasion en diverses circonstances d’avertir nos compatriotes sur le sens de la nouvelle mascarade qui s’est déroulée ce lundi 3 mai 2010. J’ai alerté sur les risques et le danger que constitue l’instauration d’un Gouvernement d’Union Nationale (GUN) surtout si l’on tient compte des expériences passées où le Togo n’a été géré que par un GUN incomplet du fait du refus de l’Union des Forces du Changement d’y participer par manque de liberté d’action.
Avec la démission du premier ministre Fossoun HOUNGBO, nous réitérons avec force notre proposition d’un GOUVERNEMENT DE TRANSITION, à terme et à mandat précis, pour organiser de nouvelles élections dans la transparence la plus absolue, dans lequel tous les partis ayant concouru à la présidentielle du 4 mars 2010seront représentés !
Nous continuerons en tout cas à lutter pour que l’on ne puisse pas se servir de notre Peuple résolu et courageux, comme d’un terrain d’expérimentation, tout ceci dans une totale impunité. Il s’agirait là d’une véritable déloyauté envers notre Mère Patrie et tous nos martyrs !
Le 1er mai 2010, les travailleurs ont rappelé leurs conditions désastreuses de travail et de vie, en faisant mémoire de leurs revendications de 2007, 2008 et 2009 restées insatisfaites. Ils ont aussi fait remarquer que le relèvement à 100 % du SMIG, est encore largement insuffisant et ne tient pas compte de la réalité de la cherté de la vie, et exigé à nouveau la gratuité de la césarienne dans les centres hospitaliers publics, proposition qui figurait dans notre programme.
Il y a longtemps que l’accord tripartite de 2006 a volé en éclats, et que le dialogue social est inexistant dans ce pays. C’est pourquoi, je me suis aussi adressé le 1er mai à tous les travailleurs togolais, pour leur dire ma conviction que leur bien-être repose tant sur la vérité des urnes que sur la vérité des comptes publics ; que le Togo doit pouvoir aider sa population à accéder à des emplois décents et des activités productives, et les inviter à rallier massivement le combat que nous menons, porteur de ces valeurs.
Ce message est aujourd’hui plus vrai que jamais ! Qui peut demain s’ériger devant le combat légitime d’un peuple qui lutte pour la revalorisation des salaires, la justice sociale, la santé et l’éducation pour tous, la transparence de la gouvernance, la vérité des comptes publics, la démocratie véritable, et finalement la vérité des urnes ?
Pour éviter de voir se dérouler un vaste mouvement de revendication le jour de l’investiture proférée en catimini, sous les yeux des caméras et de la presse locale et internationale, les manifestations ont été interdites en semaine et aussi en dehors de la capitale Lomé, contrairement à ce qui est autorisé par la Constitution togolaise. Cette crainte du pouvoir de l’ampleur de la revendication populaire en dit long sur la justesse de la Résistance Citoyenne !
J’appelle les travailleurs togolais lassés de soumettre au pouvoir des doléances qui sont aussitôt ignorées, à rejoindre le vaste mouvement de revendication qui traverse le pays tout entier. Nous devons continuer à manifester pacifiquement notre mécontentement et notre volonté d’aller vers la vérité des urnes, samedi prochain et dans les semaines qui suivront.
Rien n’est définitivement joué, et encore moins dans le contexte politique actuel de notre pays ! Nous devons tous ensemble maintenir inlassablement la mobilisation au niveau de l’ampleur des changements nécessaires pour commencer à résoudre les graves problèmes qui caractérisent la situation de notre pays et sont à la base de la déshumanisation de millions de togolais! Libérer le Togo de la misère et de la servitude, telle est la raison d’être du combat d’OBUTS !
En avant la Résistance citoyenne, et que Dieu bénisse le Togo et chacun de ses enfants !
Fait à Lomé le, 5 mai 2010.
Le Président National d’OBUTS,
Agbéyomé KODJO.