KANAL K 1 Samedi 5 mars 2011,20h Suisse.
Journalistes : Sylvain Amos un confrère basé en Allemagne : Romain Koudjodji
Email : fenetre.afrique@gmail.com
Samedi 5 mars 2011, 20-21h.
Partenaires: Togocity.com et icilome.com
Invité : Dr Yves Ekoué Amaïzo, Directeur du Groupe de réflexion et d’Action, Afrology et aussi le Coordinateur Provisoire du Collectif pour la Vérité des Urnes (CVU), groupe indépendant de la Diaspora (www.cvu-togo-diaspora.org).
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Dr Yves Ekoué Amaïzo merci de nous accompagner en direct depuis Vienne, Vous êtes Directeur du Groupe de réflexion et d’Action, Afrology et aussi le Coordinateur Provisoire du Collectif pour la vérité des urnes, groupe indépendant de la Diaspora (www.cvu-togo-diaspora.org), vous êtes également auteur de plusieurs ouvrages dont les deux que j’ai sélectionné pour cette émission :
- Crise financière mondiale. Réponses alternatives de l’Afrique, éditions Menaibuc Paris 2010
- Un livre collectif dirigé par Y. E. Amaïzo, La neutralité coupable. L’autocensure des Africains, un frein aux alternatives ? avec une préface d’Abel Goumba et une postface de Têtêvi Godwin Tété-Adjalogo, éditions Menaibuc, Paris, 2008.
Voici quelques questions qui permettent d’éclairer nos auditeurs :
1. M. Yves Ekoué AMAÏZO l’actualité c’est aussi la révolution en Libye. On assiste depuis la révolution libyenne à des tueries tant du côté des manifestants que des proches de Kadhafi. Pensez-vous que le Guide Libyen appartient désormais au passé ou va-t-il résister face à la volonté populaire qui souhaite une démocratie ?
Il faut comprendre le fonctionnement de la Libye pour répondre à votre question. La Libye a pour nom « La Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste ». La population libyenne est en majorité de culture arabe, et à plus de 99 %, de confession musulmane sunnite. Colonisée par le Royaume d’Italie qui a occupé la Libye depuis 1912, le pays fut occupé par les Britanniques de 1941 et 1946 et n’est devenu indépendant qu’après la 2e guerre mondiale. La Libye a proclamé son indépendance en 1951 sous la forme d’une monarchie dirigée par Idris 1er. Celui ci fut renversé par un coup d’état militaire en 1969 par un certain Colonel Mouammar Kadhafi.
Le modèle mis en place ressemble de loin à celui de l’Egypte du Président Gamal Abdel Nasser et repose sur un Conseil de commandement de la Révolution (une forme de concentration du pouvoir au centre).
Il faut éviter de parler du système libyen uniquement au regard du système de droit constitutionnel républicain occidental ou encore de croire qu’il n’y a pas de démocratie au niveau local, notamment ce qu’il est convenu d’appeler la démocratie locale. Cette forme reste soumise à des « pressions » du Conseil de Commandement de la Révolution (CCR), ce qui explique souvent la chasse aux démocrates souvent et systématiquement assimilés à des opposants.
Pour mieux comprendre le système et les alliances et changements d’alliances, il importe de rappeler que :
- Le Colonel Mouammar Kadhafi est un « Guide de la Révolution » et non pas un Président au sens des Républiques occidentales ;
- En réalité, il existe un Secrétaire général du Congrès Général du Peuple (CGP) qui en fait sur le « papier » serait le véritable chef de l’Etat, et depuis 2010, il semble qu’il s’agit de Mohamed Abou el-Kassim Zouaï ;
- C’est par contre le Secrétaire du Comité Général du Peuple, Baghdadi Mahdadi Mahmudi qui serait l’équivalent du Chef du gouvernement. En réalité, le Congrès général du peuple (CGP) fonctionne comme un organe législatif. En principe, le bureau politique du CGP peut décider en principe d’être indépendant du « pouvoir central ». C’est cet espace de liberté que choisissent les responsables des mouvements de contestation pour se démarquer du Conseil de Commandement de la Révolution (CCR) et du Congrès Général du Peuple (CGP).
En réalité, le système s’est toujours organisé pour empêcher cette démocratie directe au niveau local d’avoir un « impact » sur les structures centrales. Cela se fait soit par l’argent du pétrole ou carrément par des intimidations, forçant certains opposants à quitter le pays. Mais la communauté internationale n’a jamais réellement jugé nécessaire de soutenir l’opposition démocratique car celle-ci ne voulait pas céder le pétrole aux occidentaux…
Aujourd’hui, avec les mouvements d’autodétermination en cours, ce sont les villes de Benghazi qui prennent les devants car il s’agit d’une opposition organisée depuis longtemps. Sauf que cette fois, l’armée s’est ralliée aux populations. Le fait que de nombreux tirs aériens ne touchent pas leur cible explique le degré de civisme des libyens militaires, qui pour un grand nombre refusent de tirer sur leurs frères ou sœurs ici et là.
En réalité, avec les mouvements d’autodétermination en cours en Libye, il y a de fait deux pôles décisionnels en Libye :
- Tripoli avec Mouammar Kadhafi à la tête ;
- Benghazi avec un coordinateur du Conseil National de Transition de la Libye, Mostafa Mohamad Abdeljalil (à vérifier en fonction de l’évolution de la situation sur place) depuis le 27 février 2011.
Le Conseil National de Transition de la Libye regroupe les villes tenues par l’opposition et tente une fois leur position stabilisée, de porter leur revendication jusqu’à Tripoli. Tous pensent qu’il n’y a que l’option militaire, mais je reste convaincu que si les Occidentaux et Barack Obama y mettent la bonne volonté, il y a des possibilités de trouver des solutions politiques qui ne peuvent évincer l’Union africaine, même si cette dernière structure est financée à hauteur de 25-30 % par le colonel Kadhafi.
C’est en 1973 que les Comités populaires ont véritablement pris leur essor de manière structurée, sortant petit à petit de la logique de tribu ou de clan. C’est ici donc qu’une certaine démocratie directe a pris place.
La notion officielle de « Jamahiriya » qui signifierait un Etat du Peuple par le Peuple, instaurée en 1977 repose sur une forme de constitution dite « Déclaration sur l’avènement du Pouvoir du Peuple ». En réalité, le pouvoir exécutif est partagé entre le Guide de la révolution, seize représentants du Congrès général du peuple, qui est l’organe législatif, et son bureau politique.
En réalité, pour réussir l’alternance politique en Libye, il va falloir que plus de la majorité des « seize représentants du Congrès général du peuple » choisissent de ne plus faire allégeance au Guide de la Révolution, Mouammar Kadhafi.
Par ailleurs cette forme de « démocratie directe » est réelle depuis que l’Internet s’est popularisé… Il ne faut d’ailleurs pas s’étonner que les télécommunications soient dans les mains du clan Kadhafi notamment certains des fils. Les lignes sont régulièrement coupées ou écoutées avec des difficultés pour communiquer avec l’extérieur lorsque la ligne est sous surveillance officielle ou officieuse.
Avec l’Internet et les liens avec l’extérieur, la population libyenne a découvert les retards et les gaspillages de ressources qui caractérisent les régimes claniques et clientélistes. C’est cela qui explique l’indignation, les révoltes et le refus d’accepter les décisions en provenance du Guide et son comité militaire centralisé…
Mais, il ne faut pas se faire d’illusions. C’est l’armée et son sens du civisme, qui peut faire la différence selon qu’elle rejoint ou pas les mouvements démocratiques et le comité de transition, ou décide de soutenir, contre promotion, argent, pouvoir, le cercle du Colonel Kadhafi.
La vérité la vraie est que l’argent du pétrole permet de soudoyer un grand nombre y compris les Occidentaux, les pays émergents comme l’Inde et la Chine qui continuent à venir prendre du pétrole et payent directement la Banque centrale de Libye. Mais l’Italie qui dépend à 30 % du pétrole libyen et la France qui dépend à 10 % doivent jouer serré entre les grandes déclarations de sanctions et les « affairismes souterrains » souvent via des intermédiaires aux passeports européens pour défendre leurs intérêts. Le problème libyen est complexe. Il faut donc poser le problème sur un plan politique et amener le Colonel Kadhafi à accepter la palabre et la démocratie souhaitée par une partie de son Peuple.
On s’aperçoit que plus de 83 sociétés ont directement ou indirectement le Colonel Kadhafi dans l’Union européenne, ceci à des niveaux élevés, entre 20 et 38 % certains. Certains des représentants disposent de la Nationalité européenne comme c’est le cas au Luxembourg et en Autriche et œuvrent pour que l’approvisionnement en pétrole continue à des taux préférentiels. Certains font même du commerce « troc » reproché à la Chine, à savoir, pièces détachés contre pétrole… Mais lorsque l’on regarde de plus près, ces pièces détachées ne sont que des armes… Les investissements qui sont provisoirement gelés ne pourront en fait que difficilement être rétrocédés au pouvoir libre en Libye car certaines banques ne se privent pas de prendre au passage des commissions extraordinaires, au point que toute la procédure de saisie ou de gel ressemble de plus en plus à du racket des avoirs libyens. Certains estiment qu’il s’agit d’une véritable arnaque… Les sommes sont estimées entre 50-100 milliards… On ne parle même pas des investissements en Afrique qui mêlent les accords secrets et la formation des ressortissants entièrement pris en charge par le Guide libyen. Vous comprendrez que je dénonce le « silence coupable des dirigeants africains » dans le livre collectif. C’est aussi ce silence coupable qui bloque les initiatives et les alternances politiques.
2. Pensez-vous que le Guide Libyen peut résister face à la pression populaire ?
Tout le monde a cru qu’il fallait quelques manifestations pour faire partir le Guide libyen qui a tissé une toile africaine et internationale de soutien notamment en recrutant des mercenaires dans les pays de l’est et en Afrique.
Les comités populaires qui ont décidé de prendre leur indépendance doivent s’attendre à une résistance farouche s’il n’y a pas d’intervention extérieure effective. Car la communauté internationale a souvent laissé tomber les Peuples d’Afrique dans leur quête de l’alternance surtout si ces peuples ne satisfont pas les conditions (accès au pétrole libyen) que souhaitent les pays occidentaux. Bref, si les intérêts des occidentaux et bientôt des pays émergents ne sont pas satisfaits, il y a de fortes chances que ce conflit perdure.
Il est souhaitable de régler ce problème en négociant une forme de sécession temporaire de l’Etat libyen sinon la vengeance du Colonel Kadhafi sera terrible et sanglante surtout que l’actualité peut sortir la Libye des préoccupations des pays occidentaux. Par ailleurs, avec l’argent, les salaires ont été payés avec 2-3 mois d’avance avec gage de non paiement retour si le Guide est encore en place… les partisans du Guide trouvent à manger, boire et les bouteilles de gaz pour faire la cuisine… alors si vous habitez Tripoli, le fief du Guide, c’est difficile de s’exposer comme un « opposant ».. et si vous n’êtes pas tout simplement mis à l’index avec les conséquences fâcheuses que vous connaissez, vous mourrez de faim… pour non approvisionnement. Cela explique les nouveaux ralliements soit à l’armée restée fidèle au Colonel Kadhafi, soit le ralliement au réseau qui gravite autour de sa tribu.
En réalité, cette crise libyenne risque de perdurer pour une autre raison. L’importante armée disponible du Colonel Kadhafi est en action. Les vendeurs d’armes sans éthiques aussi ! Certains pays occidentaux ne peuvent avoir une croissance économique que s’ils vendent des armes… Donc ils ont intérêt à vendre des armes, des munitions et toutes formes de structures de destruction pour soutenir leur budget. Mais certains pays émergents trouvent là un nouveau débouché. C’est ainsi que les deux parties en présence se retrouvent à recevoir ces armes pour mener une « guerre interne » qui pourrait perdurer. Il ne faut pas que les populations africaines, prises en otage, en deviennent les victimes surtout qu’il semble maintenant qu’il existe des accords secrets pour envoyer des militaires se former et que les meilleurs deviennent des mercenaires, des fonctionnaires voire des espions pour le réseau du Colonel Kadhafi. La transparence n’étant pas le propre de ce régime, ni celui de la plupart des pays africains, il est difficile de croire que la vérité sortira un jour sauf si le gouvernement togolais consent à nous dire s’il a signé un accord secret qui fait que de nombreux Togolais se voient retirer leur passeport dès qu’ils sont en Libye.
3. Dans votre récent communiqué vous dénonciez la nonchalance du régime de votre pays qui ne fait aucun effort pour le rapatriement des ressortissants Togolais en Libye. Êtes-vous en contact avec vos compatriotes et combien sont-ils ?
Nous nous sommes étonnés de savoir pourquoi le Togo ne rapatrie pas ses ressortissants dont le nombre inscrit demandant le rapatriement avoisine maintenant les 1000 personnes… et pourrait le dépasser puisque les membres de la Diaspora ne peuvent s’inscrire que s’ils en ont la possibilité. Le nombre de togolais envoyés en Libye est connu de Faure Gnassingbé. Mais, il ne peut le révéler car la prochaine question est : qu’est ce que les Togolais, aussi nombreux, sont allés faire là-bas ? Quels sont les contrats signés ? Est-ce vrai que le Passeport des Togolais et togolaises sont confisqués ? Etc. Il ne s’agit donc pas de négligence mais bien d’un mépris du Peuple togolais et de la peur de la vérité sur les transactions secrètes entre le Guide libyen et Faure Gnassingbé.
Le Gouvernement togolais refuse toujours de compter les membres de la Diaspora. Vous savez que la Diaspora est désormais structurée. Nous sommes organisés maintenant au sein du conseil Mondial de la Diaspora togolaise où j’occupe le poste de Conseiller économique. Le CMDT est dirigé par Dr Amouzou. Notre mot d’ordre adopté justement en février 2011 lors de la Conférence de Fribourg en Suisse, est : « aucun Togolais ou aucune Togolaise de la Diaspora ne doit se sentir seul… » . Cela a joué aussi pour les Togolais en Libye qui ont approché la Présidence de la République togolaise à plusieurs reprises et n’ont pas eu à ce jour de réponses satisfaisantes. Mais, le contact avec nos compatriotes dépend des lignes téléphoniques qui sont coupées assez régulièrement. Le courriel (Email) est sous surveillance et ne fonctionne que par intermittence sur Tripoli.
Je dois revenir sur le fait qu’il existerait des accords secrets avec les Etats africains pour envoyer des militaires se former en Libye. On leur retire leur passeport et ils circulent avec des papiers libyens et dépendent pour leur sécurité des Libyens. Justement, depuis 5 jours, les Libyens ont informé qu’ils ne peuvent plus assurer la sécurité de nombreux ressortissants… et c’est là que nous sommes intervenus pour aider les Togolais de Libye car l’Ambassade du Togo n’a pas les moyens et son téléphone ne marche pas. Il faut savoir que le dossier n’est pas géré par le Ministère des Affaires étrangères mais par celui en charge de la Sécurité, qui vient de voir un ministre être limogé pour raison inconnue.
Mais plus grave, il semble que les meilleurs « étudiants » étrangers qui sortent des promotions de la formation en Libye peuvent se voir offrir des possibilités de postes, relativement bien payés pour devenir des mercenaires ou des espions. Ils peuvent se voir confier des missions en Afrique par les services secrets de Libye. Vous comprenez l’embarras du Togo si cette vérité venait à être déballée sur la place publique lors du retour de nos compatriotes togolais de Libye. Il semble en plus que certaines personnalités, notamment au niveau du ministère de la sécurité togolaise et dans l’armée, tiraient un grand profit de ce mécanisme. Qui aurait pensé que la démocratie et la vérité des urnes allait frapper à la porte de la Libye et dans le fief du Colonel Kadhafi ?
On se demande donc si les derniers changements de ministre ont quelque chose à voir avec tout ceci. Mais toujours est-il que le Togolais et leurs familles ne sont pas rapatriés alors qu’ils le demandent surtout que plusieurs autres Etats africains procèdent au rapatriement. Je crois sincèrement qu’il est préférable de poser la question à Faure Gnassingbé et à son équipe.
4. Trouvez-vous une raison concrète de la négligence du Gouvernement togolais de rapatrier vos ressortissants en danger ? Vu que certains pays africains ont déjà commencé à évacuer leurs citoyens?
Nous ne croyons pas la négligence du gouvernement togolais mais plutôt à une difficulté à dire la vérité sur les contrats qui lient le Togo et la Libye sur les échanges de militaires en formation, les mercenaires, etc.
Par ailleurs, si ces personnes rentrent, que vont-ils faire au Togo ? On ne sait d’ailleurs pas quel est le statut des Togolais là bas, puisque leurs passeports ont été retirés et qu’ils dépendent des autorités libyennes… Donc on peut dire que ces Togolais sont temporairement sans véritable titre de circulation au plan international pour certains, ceci dans le cadre d’accords secrets.
Il faut donc que le Gouvernement dise la vérité à la population togolaise. C’est tout le travail de vérité et de transparence du mouvement citoyen. Par ailleurs, avec la difficulté de circuler, il est difficile de se procurer de l’argent et des bouteilles de gaz pour cuisiner… Certains Togolais ne peuvent plus manger et j’ai pu voir des enfants togolais en bas âge, j’étais en mission à Tripoli il y a à peine un mois
5. Il y a un an que le Président Faure Gnassingbé a été réélu. Quel bilan faites-vous après un an de gestion ?… on rappelle tout de même que vous êtes aussi économiste… Peut-on dire qu’au Togo l’opposition dirige la rue, et le pouvoir gouverne ? Car après un an de marche de contestation tous les samedis l’opposition n’a pas réussi à faire partir Faure Gnassingbé.
Le bilan est négatif pour le Peuple togolais et très positif pour son équipe et surtout les étrangers dont il défend les intérêts au Togo.
Vous dites qu’il a été réélu mais c’est la Cour constitutionnelle qui a annoncé un résultat sur des « recommandations » des autorités au pouvoir. La même chose se passe en Côte d’ivoire et la communauté internationale et l’ONU crient au scandale et au Togo, c’est le silence.
Pourtant est-ce qu’il y a des marches tous les samedis depuis ces élections de mars 2010, entachées d’irrégularités graves. Il n’y a actuellement en fait aucun Président au Togo. Mais si vous considérez les affirmations des uns et des autres, il y a alors deux Présidents. Mais aucun ne peut passer le test de la vérité des urnes. Assurément Faure Gnassingbé ne peut passer le test de la vérité des comptes. Donc, le bilan du premier mandat étant négatif et non transparent, le bilan provisoire est négatif. Si j’avais noté le Premier ministre 8 sur 20 après six mois d’activités, il est difficile de donner plus de 5 sur 20 à Faure Gnassingbé après 6 ans de gouvernance de l’improvisation et de la duplicité.
Malheureusement, il semble que ceux des partis politiques qui peuvent aider à apporter un peu de vérité et de lumière sur les pratiques dans ce pays ont choisi, soit de rejoindre le système et d’en profiter, soit alors de fuir le système et d’aller trouver leur bonheur ailleurs. Il est donc grand temps maintenant de demander au Peuple togolais de prendre ses responsabilités car en définitive, c’est aussi le fait d’accepter toutes ces injustices, ces corruptions ordinaires, ces refus d’organiser une vie collective qui contribuent à perpétuer la situation actuelle.
Sur le bilan, vous devez demander à Faure Gnassingbé de faire son propre bilan. Il n’a pas celui des 5 dernières années de manière objective. Comment voulez-vous qu’un bilan contradictoire sur les 12 premiers mois sous sa gestion puisse se faire dans la transparence.
D’ailleurs, qu’est-ce qu’il risque ? C’est l’impunité totale du moment qu’il gère bien les intérêts de puissances occidentales qui n’ont que faire de l’autodétermination des Togolais et Togolaises.
Par ailleurs, il semble que les autorités ont quelques difficultés de faire le bilan de l’utilisation de l’argent des contribuables et celui de l’Union européenne notamment pour les travaux d’infrastructures… On voit des routes être cassées mais on ne les voit pas encore reconstruites…
Mais le vrai problème est ailleurs. Il n’y a pas de possibilité de s’organiser librement au Togo sans être menacé par une armée non républicaine qui n’a pas compris qu’il faut augmenter la richesse au Togo pour mieux la partager et non continuer à ponctionner ceux qui peuvent la créer ou même dans le cas du DG de ReDeMaRe, de l’empêcher de créer cette richesse en faisant main basse sur ses avoirs et celui des adhérents au Groupement d’intérêt économique.
Malheureusement, avec cette absence de liberté de choix et la peur entretenue et la retenue coupable des confessions religieuses au Togo, certains, trop nombreux encore, des citoyens togolais finissent par croire que le seul système qui puisse fonctionner au Togo est celui du réseau de Faure Gnassingbé.
Voici quelques points saillants qui expliquent que le bilan de 6 ans de Faure Gnassingbé est négatif :
- L’improvisation et la gouvernance à vue doublée d’une corruption fondée sur la loi du silence au sein d’un réseau aux multiples ramifications ésotériques et parfois mafieuses ;
- Le refus catégorique de faire avancer le Togo vers la démocratie et la transparence (pas de liste électorale, pas d’élections communales et législatives) et refus catégorique de compter la Diaspora togolaise entre 1,6 et 2,1 millions de personnes.
- La mauvaise utilisation des compétences togolaises avec comme seule solution la corruption avant de se faire « limoger » ;
- L’accaparement de toutes les structures de capacités productives du Togo, par des personnes liées à Faure lui-même, de plus en plus de femmes ;
- L’absence de liberté de la presse (aux 3 organes de presse fermés notamment Métropolys, X-Solaire et Providence.) ;
- L’arbitraire avec une armée complice, l’absence de justice et l’emprisonnement d’innocents sans procès et le renforcement de prisonniers politiques sans jugement ;
- L’hypocrisie pour ce qui est de la réconciliation alors qu’il s’agit d’un cannibalisme politique et la tricherie pour ce qui est de la vérité des comptes (près de la 35 % de l’argent du port du Togo n’est pas déclaré officiellement et finit sa course dans les poches de certains dignitaires du régime habitant sur les collines de Lomé…
- Le bougisme sans changement, sans liberté et sans démocratie est une gouvernance de la falsification.
Le résultat est à l’image de ce que l’on peut appeler le bougisme sans changement et ne peut déboucher que sur une gouvernance de la falsification. Le Président bouge, le Premier ministre bouge, mais rien ne change véritablement sur les réformes institutionnelles, les faux « dialogues inclusifs » sans agenda, ni résultats concrets, etc… Il semble d’ailleurs que certains protagonistes aient touché de l’argent pour se rendre à la réunion du 28 février 2011, censée de servir de paravent pour un dialogue renoué avec l’opposition et que le Premier Ministre Gilbert Houngbo devait annoncer avec fanfare à Bruxelles… Ce fut raté avec l’absence du FRAC.
Bref, le Gouvernement fait semblant de gouverner et le Peuple togolais fait sembler de lui accorder un crédit quelconque… Par contre, il ne faut pas faire semblant de noter le Président et son équipe : c’est de la gestion à vue sans visibilité et à ce titre, il est difficile de donner au dessus de 5 sur 20. Mais sur les droits humains, la liberté de la presse, le système électoral et le refus de compter la Diaspora dans le recensement, c’est en dessous de 5 sur 20.
Quant à l’Armée, elle n’est pas républicaine dans sa grande majorité. Et les situations à la tunisienne ou à l’égyptienne supposent que l’Armée choisisse de se mettre du côté du Peuple au lieu de devenir un agent parasite dans le système économique qui contribue à empêcher les gens qui travaillent pour gagner dignement leur vie de le faire.
Le système RPT choisit même d’enfermer des gens innocent comme le DG de ReDéMaRe. Sous Faure Gnassingbé, le nombre d’innocents en prison est en augmentation alors que ceux de son régime qui ont saisi les biens de ReDeMaRe se sont empressés de prendre tout l’argent et de se le partager… C’est cela qui explique la difficulté pour libérer un innocent. Il est donc proposé à Faure Gnassingbé de libérer ce Monsieur actuellement malade, afin de le laisser aller se faire soigner à l’étranger et en profiter pour libérer les autres prisonniers politiques.
Faut-il parler des femmes d’autres prisonniers politiques comme son propre frère Kpatcha Gnassingbé ? Pourquoi tout ceci ne peut se résoudre pacifiquement devant les Tribunaux de la République ?
Si Faure Gnassingbé acceptait les préalables posés par les partis politiques de la place qui ne font pas de compromission avec l’éthique, il pourrait alors objectivement redorer sa crédibilité perdue ainsi que celle de son Gouvernement où le taux de rotation des ministres donne le tournis.
Mais c’est véritablement lorsque les pays occidentaux qui lui ont fait confiance auront du mal à récupérer l’argent qu’ils ont prêté… que peut-être ils sortiront de leur naïveté sur la vraie nature de ce système qu’ils ont contribué à entretenir depuis 43 ans.
CONCLUSION :
Les 22 propositions du CVU existent. Le Gouvernement ne veut pas les mettre en place. Mais les partis optant pour l’alternance politique ainsi que les Mouvements citoyens doivent pouvoir se réunir pour les mettre en œuvre… Qui doit prendre l’initiative ? Vraisemblablement l’ANC, encore faut-il que cette structure mette en place des règles démocratiques de prise de décision pour faciliter un grand rassemblement des forces de l’alternance.
2015, les élections présidentielles arrivent à grande vitesse en attendant les élections législatives et communales, pas encore à l’ordre du jour pour le pouvoir actuel. Alors le bilan en peut être positif.
Mais la vraie question est de savoir si les forces de l’alternance au Togo sont capables de s’unir sur des considérations allant dans l’intérêt des populations ou vont-ils continuer au travers des réunions ésotériques à faire du nombrilisme et se prendre pour le centre du Togo alors qu’ils ne sont, pour la plupart, que le centre de leur parti, souvent sans avoir été démocratiquement élus. YEA.
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Autres articles de cette série
- INTERVIEW du Dr Yves Ekoué Amaïzo sur RADIO KANAL K, Suisse (6 mars 2011)
- Radio Kanal K - Fenêtre sur l'Afrique du 5 mars 2011 (5 mars 2011)
Notes:
- Radio Kanal K – « Fenêtre sur l’Afrique » est une émission hebdomadaire de Radio Kanal K à Aarau en Suisse ↩
Fofo says
“Mais la vraie question est de savoir si les forces de l’alternance au Togo sont capables de s’unir sur des considérations allant dans l’intérêt des populations ou vont-ils continuer au travers des réunions ésotériques à faire du nombrilisme et se prendre pour le centre du Togo alors qu’ils ne sont, pour la plupart, que le centre de leur parti, souvent sans avoir été démocratiquement élus.” YEA.
Tout est dit dans ce dernier paragraphe de la conclusion de Yves. Franchement on ne se retrouve plus dans nos partis! Je veux dire les togolais qui ont un niveau d’instruction élevé!
Ayons le courage et disons le à haute voix : l’ancienne UFC (en qui j’avais mis ma confiance jusqu’en 2005) aujourd’hui ANC car surfant sur le fond de commerce de l’UFC authentique, n’est autre que ce que l’on appelle dans le christianisme d’aujourd’hui “les pasteurs illuminés” qui embobinent les esprits les plus faibles.
Le malheur du Togo, c’est le niveau d’instruction de ses fils. La révolution maghrébine en dit long!
S’il est incontestable que l’ANC est le parti le plus populaire du Togo, il est loin de détenir la vérité pour faire sortir le Togo de l’ornière.
Ce parti portera la lourde responsabilité devant l’histoire face à son incapacité notoire d’unir l’opposition sur une stratégie de changement et un projet précis de société sur 5 voir 10 ans si on souhaite une alternance maitrisée.
Fofo