Emission Africa numéro 1 du 1er septembre 2011 (www.africa1.com)
Le Journal des Auditeurs, 13h30- 14h00
Journaliste : Eugénie DIECKY
Invité: François FABREGAT, Secrétaire général de CVU-Togo-Diaspora
Environnement politique de l’Affaire
- François FABREGAT : Il faut d’abord considérer que ce procès met aux prises essentiellement des membres de la fratrie GNASSINGBE, qu’il s’agisse du supposé agressé Faure Gnassingbé ou des supposés agresseurs Kpatcha GNASSINGBE et Essolizam GNASSINGBE.
- Du fait de l’opacité la plus totale dans la quelle a été menée la procédure d’instruction et de la quasi-absence d’informations diffusée par l’institution judiciaire les observateurs ont été obligés de se contenter jusqu’à ce jour ou s’ouvre le procès, des assertions qui ont répété à satiété que les protagonistes sont accusés de “tentative d’attentat contre la sûreté de l’Etat, groupement de malfaiteurs, rébellion, violences et complicité”. Mais jusqu’ici ce ne sont pas les inculpés qui sont les agresseurs, ce sont eux, en particulier Kpatcha, qui le 14 avril 2009 ont été agressés par l’armée togolaise dans leur domicile personnel. Par ailleurs Kpatcha a été tenu au secret depuis le jour de son arrestation devant l’Ambassade des Etats-Unis jusqu’à ce jour.
- En tenant compte de ces éléments et connaissant bien les pratiques qui ont été en usage au Togo pendant plus de 40 ans, il n’est pas étonnant que les togolais perçoivent ce nouvel épisode des chroniques judicaires du Togo, comme un règlement de comptes familial. Ils ne sont sans doute pas loin de la vérité.
- Pour être complet il faut préciser que Kpatcha GNASSINGBE est un ancien ministre de la Défense du Togo et que depuis 2009 il n’y a plus de Ministre de la Défense au Togo, cette fonction étant directement assumée par Faure GNASSINGBE. Cela veut peut-être aussi dire quelque chose.
Environnement judiciaire : Cour Suprême Absence séparation des pouvoirs
- François FABREGAT : La question maintenant reste de savoir comment seront conduits les débats judiciaires par la Cour Suprême du Togo. En effet dès lors qu’il y a des implications politiques dans une affaire il n’y a plus au Togo de respect de la séparation des pouvoirs. Jusqu’ici c’est une règle absolue, qu’il s’agisse des décisions de la Cour Suprême ou également de la Cour Constitutionnelle en matière d’élections.
- Si la Cour Suprême vient de rendre un arrêt mémorable et rare, à savoir dire le droit et faire émerger la vérité en libérant M. SAMA le DG de ReDeMaRe et en condamnant la décision prise en conseil des ministres de suspendre l’activité de ReDeMaRe, déclarant la décision illégale, il n’est pas certain que dans l’affaire Kpatcha, la vérité émane des débats.
- En effet, hier même, le correspondant à Lomé de votre consœur africaine Koaci s’interrogeait utilement en ces termes : « Le pouvoir place ses pions pour une condamnation de Kpatcha Gnassingbé » sur les manœuvres de l’institution judiciaire pour composer un collège de juges entièrement affidé au pouvoir politique de Faure GNASSINGBE, en citant le juge Abalo PETCHELEBIA désigné pour présider les débats un personnage décrié au Togo pour sa propension à piétiner le droit. Pour donner une idée de l’Etat d’esprit de ce personnage il faut rappeler que une interview qu’il avait accordée à un confrère de la place, il avait osé justifier « les actes symptomatiques de corruption des magistrats dans l’administration de la justice, par la faiblesse de leurs rémunération ». Normalement il revenait en principe au juge GAMATO, jouissant d’une réputation d’intégrité morale et de professionnalisme, de diriger ce procès. Pourquoi est-il écarté ? Parce qu’il avait pris la décision de libérer M. SAMA ? on peut se poser la question. Par ailleurs Eklou BOKO (Procureur Général près la Cour Suprême de Lomé), qui avait courageusement requis la libération de M. SAMA Essohamlon a lui aussi été débarqué au profit du juge MISSITE qui va occuper lors de ce procès, le poste de Procureur général à la place de son doyen et supérieur hiérarchique. Enfin Mme AHADZI-AZANLEKO, 1er Avocat général qui aurait dû le suppléer, est également zappée par le juge Abalo PETCHELEBIA, qui aurait l’habitude de procéder ainsi dans les dossiers où il aurait un intérêt.
- Lorsque c’est politique non-respect de la séparation joue à fond
Réponses aux auditeurs…
- Les togolais ont aujourd’hui d’autres préoccupations quotidiennes que le procès de Kpatcha GNASSINGBE. Quand le plus grand nombre d’entre eux n’a même pas les moyens de s’acheter un bol de maïs, le procès de Kpatcha quelle qu’en soit l’issue n’améliorera pas leur quotidien.
- Comment peu-t-on affirmer que les prévenus peuvent exercer leurs moyens de défense lorsque le dossier d’instruction qui contient parait-il 1000 pages, n’est communiqué aux avocats de la défense que la veille de l’ouverture des débats devant la Cour Suprême.
Ecouter la suite…
Podcast: Play in new window | Download (Duration: 27:33 — 12.6MB) | Embed
S'abonner aux Podcasts : RSS